Les clichés français sur l’Azerbaïdjan

Ce n’est pas un article de propagande, mais un article informatif. Il vaut mieux préciser ce que l’on sait et ce que l’on ne sait pas. Il est dit que « la connaissance apporte la lumière et l’ignorance maintient dans l’obscurité ».
En tant qu’avant-gardes de la presse française, vous devez connaitre certaines choses pour éviter l’ignorance parfois semée expressément. 

Force est de constater que le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est présentée dans la presse française avec des phrases similaires à celles qui sont les suivantes : « les Arméniens opprimés ont été attaqués par des azerbaïdjanais sauvages » ; « Il s’agit d’une agression des Azerbaïdjanais musulmans contre les Arméniens chrétiens » ; « la Turquie rejoint l’Azerbaïdjan et viole la sœur cadette de la France » ; « le Karabakh appartient aux Arméniens et les Azerbaïdjanais veulent l’arracher aux Arméniens… ». La presse déborde, déferle de telles accusations dans un pays aussi grand que la France. Et il est triste à dire qu’une telle couverture de l’opinion publique ne peut être comparée qu’au comportement de la presse russe, tandis qu’il existe des différences significatives en ce qui concerne la liberté de presse entre ces deux pays.
En d’autres termes, 90% des médias en Russie sont contrôlés à partir d’un seul centre, mais ce n’est pas le cas en France. Cependant, dans la présentation des informations sur un conflit dans le Caucase, la presse française se comporte comme la presse russe.

Il y a un certain nombre de faits que les Français devraient connaître sur l’Azerbaïdjan.

1. Il n’y pas de confrontation entre musulmans et chrétiens en Azerbaïdjan. Dire le contraire est un mensonge et n’a aucun fondement. Le conflit entre les Arméniens et les Azerbaïdjanais n’a aucune source religieuse. En plus des Arméniens, il y a des russes et des molokans chrétiens en Azerbaïdjan. Lors de l’effondrement de l’Union Soviétique, les russes, les molokans et d’autres habitants ayant une identité chrétienne étaient plus nombreux que les Arméniens en Azerbaïdjan, mais leur différence religieuse n’a jamais eu d’impact dans leurs relations avec les Azerbaïdjanais musulmans. Le conflit avec les Arméniens est de nature sécessionniste militaire ou de nature indépendantiste séparatiste armée. Leur intention est donc d’établir un État indépendant sur les territoires reconnus par la communauté internationale comme étant ceux de l’Azerbaïdjan et poursuivre ensuite l’annexion de ce territoire à l’Arménie avec un referendum dans une deuxième étape. Pour comparaison, nous pouvons citer l’exemple de la Corse en France. Si un groupe de Corses armés lance une campagne militaire visant à remettre en question la souveraineté de la France, comment le public français et l’État réagiraient-ils ?

2. Une autre fausse accusation est d’avancer qu’il y a une idée de « touranisme » turc en Azerbaïdjan qui veut dominer ou discriminer les autres communautés et cela devient une source de conflit interethnique. En réalité, en Azerbaïdjan il y a aujourd’hui 17 communautés différentes dont celle d’Arméniens (il faut rappeler que même à l’heure actuelle, une communauté d’environ 30 000 Arméniens vit pacifiquement à Bakou). Les Talysh, les Kurdes, les Juifs, les Tats, les Qvars, les Tsakhurs, les Lezguiens, les Routouls, les Molokans (communauté religieuse), les Ingloïs, les Romes, les Assyriens, les Oudienes, les Allemands et les Russes. Il y a aussi des communautés d’une taille plus petite, dont chacun compte de 10 à 15 milles personnes : les Budugs, les Jeks, les Eliks, les Haputs, les Qryz, les Khinaligs, les Yerguchs. Rien ne montre que ces communautés, même les plus petites, soient soumises à une quelconque assimilation ou discrimination administrative. Par exemple, les Qryz étaient de 2 250 au recensement de 1926, mais ils sont aujourd’hui 11 000.
Par ailleurs, en France aussi, il y a plusieurs grandes communautés comme les Italiens, Chinois, Africains subsahariens, Marocains, Turcs, Portugais et Algériens. Il y a aussi des groupes ethniques tels que les alsaciens, les bretons, les flamands, les corses, les catalans, les basques avec une population allant de plusieurs centaines de milliers à un million et plus. Aucun d’eux n’a de revendications d’autonomie ou d’État indépendant. Car, la France est une république unitaire. L’Azerbaïdjan aussi.
Il est vrai qu’en Azerbaïdjan, la majorité de la population est composée d’une communauté turcophone, éthiquement très similaire aux tatars de la Russie ou aux peuples turcophones de l’Asie centrale, (à ne pas confondre avec les turcs ottomans, puisque l’Azerbaïdjan n’a jamais fait partie de l’Empire ottoman), mais aucune minorité n’a été persécutée ou discriminée par la communauté majoritaire ni par l’État. Le pays a un vrai problème de démocratie en général, il est gouverné par un régime autoritaire strict. La corruption est endémique (bien que cela n’ait jamais empêché les politiques français de maintenir une relation particulièrement étroite avec le dirigeant autoritaire de l’Azerbaïdjan, et nous, en tant que démocrates azerbaïdjanais, l’avons toujours critiquée et nous continuerons à le faire), mais la dictature et la corruption n’ont pas une identité nationale.

3. Une autre habitude des journalistes est d’affirmer que la Turquie défend l’Azerbaïdjan.
C’est absolument vrai. La Turquie soutient l’Azerbaïdjan dans le conflit arméno-azerbaïdjanais. Tout comme la France qui soutient la position de l’Arménie, la Turquie soutient l’Azerbaïdjan pour les mêmes motifs et raisons. Les raisons liant la Turquie à l’Azerbaïdjan sont plus nombreuses que celles liant la France à l’Arménie. La France appelle l’Arménie sa « petite sœur », mais la Turquie n’est pas un grand frère de l’Azerbaïdjan, c’est juste un pays frère.

4. En revanche, l’affirmation disant que « l’armée turque se bat en Azerbaïdjan », est un mensonge et n’a aucun fondement. Bien que des milliers de turcs soient volontairement prêts à partir participer aux combats en Azerbaïdjan, aucun d’entre eux n’y a été autorisé. En plus, la majorité des citoyens turcs voulant volontairement rejoindre ce combat sont des Azerbaïdjanais vivant en Turquie. Il convient de noter que le nombre d’Azerbaïdjanais vivant en Turquie et ayant la nationalité turque est de quelques millions. D’autre part, parmi les Arméniens participant à cette guerre, il y a des citoyens français.

5. Une phrase utilisée assez souvent c’est « la Turquie arme l’Azerbaïdjan ». C’est vrai, en partie. L’Azerbaïdjan achète du matériel militaire et des armes à plusieurs pays, dont la Turquie. La Russie occupe la première place, l’Israël, l’Ukraine arrivent avant la Turquie. Dans ce cas, ne serait-il pas plus logique de dire que « la Russie ou l’Israël arme l’Azerbaïdjan ? ». Parmi les armes achetées par l’Azerbaïdjan à la Turquie, il y a principalement des véhicules aériens sans pilote.

6. Un autre propos répété, c’est « la Turquie enflamme le conflit ». C’est un mensonge complet. L’Azerbaïdjan doit libérer ses territoires occupés. 5 résolutions de l’ONU (dont 4 celles du Conseil de sécurité dont la France est membre permanent avec un droit de véto) ont été adoptées pour libérer ces territoires occupés, et les dirigeants arméniens les ont toujours ignorées. Le Groupe de Minsk de l’OSCE dont la France assure la coprésidence, a été créé pour mettre en œuvre les décisions de l’ONU et des autres organisations internationales. Cependant, ces résolutions n’ont pas été mises en œuvre et les comportements actuels de la France montrent qu’elle est une alliée stratégique de l’Arménie. Cela signifie que l’inaction de la France joue un rôle plus important dans l’escalade militaire que l’activité de la Turquie. Après tout, avec ou sans Turquie, aucun pays ne peut accepter l’occupation perpétuelle de ses territoires. Oui, il y a une dictature en Azerbaïdjan. Le dictateur azerbaïdjanais a toujours été dans la liste des « favoris » de la France. L’épouse du dictateur azerbaïdjanais a reçu la plus haute distinction en France.
Le peuple azerbaïdjanais, dont les territoires sont occupés, n’est pas coupable pour ce dernier…

Ganimat Zahid